Le casse-croûte tunisien – par Guy

– Tunisie –

J’ai passé mon enfance en Algérie, à Aïn Berda, près d’Annaba. L’été, nous partions chez ma grand-mère paternelle à Megrine Riadh, en proche banlieue de Tunis. Un peu revêche la grand-mère Gilberte, mais elle nous faisait des jus de raisin de sa treille, pressés au moulin à légumes et aussitôt mis au frigo, un nectar. De temps à autre mes parents passaient près du marché de Tunis par la boutique d’un djerbien ou d’un sfaxien pour y acheter les rituels casse-croûte tunisiens, chacun le sien, avec ou sans harissa. Préparé sous nos yeux avec un gros pain rond, frais et fendu presqu’en deux puis fourré de ses 8 ingrédients dans un ordre bien précis, les prémisses d’un régal. Le casse-croûte tunisien est un repas à lui seul, roboratif à souhait, capable de nourrir un ouvrier du bâtiment, alors un enfant ! Le commerçant l’enveloppait dans un épais papier gris ou dans du journal. Arrivés chez la grand-mère, nos parents le posaient directement dans l’assiette et on le mangeait en famille, pas d’couteau, pas d’fourchette! Parfois il nous fallait de la persévérance pour le terminer ! Il faut absolument les deux mains pour le tenir et le manger, sans oublier d’appuyer un peu dessus pour le tasser mais sans laisser jaillir les ingrédients, surtout les olives et les miettes de thon qui ont tendance à s’échapper. Mais quel délice : le goût de l’harissa fraîche qui enflamme le palais sans le brûler, celui plus doux du thon à l’huile et de l’oeuf, l’amertume des variantes et des olives, le moelleux des cubes de pommes de terre cuites à l’eau, la fraîcheur de la salade tunisienne (concombre, tomate, oignon et poivron), celle de la purée de carottes épicée et… surtout : le piment vert, le tant redouté felfel, qu’il faut s’arranger à croquer à peu près au milieu du repas pour avoir encore de la matière pour éteindre le feu ! Ou tricher et l’enlever discrètement ! Le tout enveloppé dans du pain italien, frais et apaisant qui a absorbé toutes les odeurs des condiments et leurs jus. Un pur moment de bonheur gustatif familial ! En 1971, mes parents sont rentrés d’Algérie pour l’Eure et Loire, pays du désespoir. Quand ils montaient à Paris, ils ne manquaient jamais de passer boulevard de Belleville pour nous ramener des casse-croûte, des baklawas ou des makrouds et du sirop d’orgeat. Aujourd’hui, quand je descends à Marseille, je ne peux m’empêcher de passer au « Carthage » soit rue d’Aubagne, soit au marché aux puces dans le 15e. Je me pose sur une table en formica, j’éteins le portable et je dévore mon CCT tout seul comme un grand, je suis au paradis !!! Inch’Allah y’en aura là-haut !

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Ingrédients

– salade tunisienne : poivron, tomate, concombre, oignon + huile d’olive
– citron et piment en saumure
– salade méchouia *
– harissa
– thon émietté
– pain italien rond (de préférence)
– huile d’olive
– olives
– quelques cubes de pommes de terre bouillies

Recette

Ouvrir le pain en 2, napper d’huile d’olive et de harissa diluée dans un peu d’eau et laisser imbiber 1 ou 2 minutes. Mettre 1 c. à soupe de méchouia puis 1 de salade tunisienne puis les morceaux de citron et le piment en saumure, 2 olives vertes et 2 olives noires.

Ajouter le thon émietté et 2 c. à soupe d’huile d’olive. Refermer le casse-croûte, attendre une à deux minutes avant de le manger.

* salade tunisienne traditionnelle composée de tomates et de poivrons grillés, de piment et d’oignons